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Les Affranchies

chronique de marie

Libres

12 Juin 2019 , Rédigé par jeaneg Publié dans #Chronique de Marie

Libres

La mélancolie passagère de ses yeux clairs jetait un regard absent sur le portrait serein mais impassible de la figure qui ornait son épaule. '' Homme libre, toujours tu chériras la mer ''. Sa peau tannée par le soleil de l'été naissant contrastait avec le blond de ses cheveux drus. A quoi pouvaient bien songer ces personnages ? Le marin à la casquette visée sur le crâne fumant passivement se remémorait-il quelque étendue lointaine se déversant aux confins du globe ? L'autre qui le contemplait sondait-il cette nonchalance presque déconcertante propre aux grand voyageurs ? Le champ des possibles s'ouvrait à leurs pieds ; ils pouvaient tout aussi bien penser encore à quelque amour perdu ou à ces corps serrés lors d'une étreinte furieuse. Mais c'était surtout la tendre indifférence du monde qui était arborée sur leurs deux visages.

Texte et photo Marie Corcelle

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L'humeur de Marie #14

13 Avril 2018 , Rédigé par jeaneg Publié dans #Chronique de Marie

L'humeur de Marie #14

"Alors, je ne sais pas pourquoi, il y a quelque chose qui a crevé en moi. Je me suis mis à crier à plein gosier et je l'ai insulté. ( … ) Mais du moins, je tenais cette vérité autant qu'elle me tenait. ( … ) J'avais vécu de telle façon et j'aurais pu vivre de telle autre. J'avais fait ceci et je n'avais pas fait cela. Je n'avais pas fait telle chose alors que j'avais fait cette autre. Et après ? C'était comme si j'avais attendu pendant tout le temps cette minute et cette petite aube où je serais justifié. Rien, rien n'avait d'importance et je savais bien pourquoi."

 

 

Vous avez déjà ressenti cette espèce d'incongruité, ce décalage entre votre corps et le reste ?

C'est comme si il était en contradiction avec chacun de vos mouvements, de vos pensées.

Mais finalement, ne pas mettre de nom là-dessus, ça a un côté pratique ; ne pas savoir qui on est, gros problème et grand avantage. Imaginez un peu la latitude d'action que cela offre : pouvoir être qui on veut, sans se voir enfermé dans un carcan d'idées préconçues ou de règles de conduites étriquées. C'est à en devenir dingue, parfois : laisser ressurgir l'autre. Le laisser venir et prendre le dessus. A quel prix ?

Tantôt genré au masculin, plus rarement au féminin. Les styles s'agencent et se déconstruisent, les émotions naissent pour mourir aussi rapidement. Rien ne dure, tout est éphémère : les envies et les désirs d'identité n'y dérogent pas. C'est l'inconstance qui prédomine, l’intranquillité qui surplombe toute volonté. La seule permanence qui subsiste est celle des marques infligées.

A grands coups d'éclats, tout envoyer valser pour recréer : se laisser évoluer dans un sens qui nous convient, au risque de faire un grand saut dans le vide. Une perverse errance, pour perdre de vue tout rivage : stratégie du hasard.

Texte et photo: Marie Corcelle

Extrait : Albert Camus - L'Etranger

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L'humeur de Marie #13

8 Novembre 2017 , Rédigé par jeaneg Publié dans #Chronique de Marie

L'humeur de Marie #13

Ca faisait 1 mois que je n'étais pas retournée chez le coiffeur, et ça commençait sérieusement à repousser. Et la repousse, il n'y a rien de pire, que vous portiez les cheveux très courts ou bien simplement courts. Ma mère me répétait tout les jours que je ressemblais à un '' kiki '' ( mais si, vous savez, les petits singes en peluche minuscule avec une coupe affreuse ), et que c'était '' la bonne longueur ''. Oui, mais non. Alors, hop, un verre de Calva, et me voilà sortie de ma caverne, tel Platon, avec l'idée du siècle. '' Maman, tu veux pas me couper les cheveux ? ''. Alors, je vous arrête tout de suite : elle ne s'y est pas opposée l'espace d'un instant. Seulement, la dernière fois que c'était arrivé, on s'en souvient très bien ( et la coiffeuse du village d'à côté aussi ) : je m'étais retrouvée avec une raie complètement décalée, et un côté rasé plus haut que l'autre. Je ressemblais un peu à une poule, quoi. Mais le Calva fait des miracles, et peu m'importaient les conséquences. Ni une, ni deux, Maman sort la mallette et la tondeuse. S'ensuit la grande question : quel sabot mettre ? Après moultes tergiversions, ce sera le numéro 3. Les consignes étaient simples : histoire de ne pas me retrouver avec des trous partout, pas de dégradé : juste un coup de tondeuse passé de manière uniforme sur l'ensemble de ma caboche. Une dizaine de minutes plus tard, ce fut presque bon : deux trois retouches, quelques corrections par-ci par là, et tintintsin ! Marie avait de nouveau la boule à zéro, et plus une tête de kiki. Ce geste, c'est peut-être un détail pour vous, mais pour moi ça veut dire beaucoup ( tiens, ça m'rappelle une chanson ). Ca n'a pas été facile, et plutôt long, tout ce chemin. Mais au fil du temps, Marine a avancé, aux côtés de sa fille. Les cheveux courts, avaient perdu de nombreuses batailles, mais ont fini par gagner la guerre. Et puis, c'est sa fille après tout. Et elle le restera, envers et contre tout. Peu importe qu'elle aime les femmes, l'important, c'était qu'elle soit heureuse, dans le fond. S'il le fallait, elle se mettrait le monde à dos et prendrait les armes pour aller pourfendre les sombres cons qui oseraient tenir quelques propos homophobes quant à la première de ses 4 filles. D'ailleurs, elle aussi a parfois l'envie de tenter de nouvelles coupes, plus courtes. Alors, tous les mois, on a le droit au fameux '' je laisse repousser, je vais essayer de récupérer un carré '', et tous les mois, on retrouve Marine avec une coupe courte bien nette et rafraichie. Et puis, qu'est ce que ça lui va bien. Récupérer un carré, mais quelle idée. Tu es une femme aux cheveux courts, Maman, et puis c'est tout.

Texte et photo: Marie C.

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L'humeur de Marie #12

13 Septembre 2017 , Rédigé par jeaneg Publié dans #Chronique de Marie

Le 23 septembre, c’est l’apéro des femmes aux cheveux courts.
A la base, ‘’ les femmes aux cheveux courts ‘’, c’est un blog. 
Un blog qui raconte des histoires de femmes, des ressentis, l’esthétique des coupes courtes, des humeurs, le pourquoi du comment on franchit l’étape. Une question d’états d’âme, de genre, de non-genre, de style, de vécu. 
Alors toutes ces femmes qui seront réunies, ce soir là, sont toutes uniques: remarquables parce qu’originales, singulières parce que fières de caractère. Cette liberté d’être soi, d’arborer fièrement son visage et son style, cette personnalité propre à chacune: voilà ce qu’est une femme aux cheveux courts. 
Alors pour fêter les 8 ans d’existence de ce blog, qui a permis à tant de personnes de se rencontrer, de se trouver, à travers la France mais aussi le monde, on célèbre cela au Rosa Bonheur, dans la capitale, dès 18h ! 

Texte: Marie C.

Photo: Beli Klein

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L'humeur de Marie #11

10 Août 2017 , Rédigé par jeaneg Publié dans #Chronique de Marie

L'humeur de Marie #11

" Qu'est-ce que tu as fait à tes cheveux ? Pourquoi tu as fait ça? " Ben, pour faire des économies de shampoing, c'est évident. J'ai aussi eu droit à des remarques sur mon manque absolu de sens moral: quant aux gens qui ont un cancer, me raser le crâne était presque un crime contre l'humanité et un manque de respect total. En d'autres termes, arrêtez de boire de l'eau, puisque une bonne partie de la population africaine n'y a pas accès ( tout le monde suit bien l'absurdité du raisonnement? ). Ah, et n'oublions pas la meilleure: je ressemble à un nazi. À un skinhead pour être plus précis. Non pas que cela me gène, mais comme dans l'esprit des gens, tous les skinheads sont nazis, là, ça me pose problème. Vous avez donc devant vous un skinhead dépourvu de sens moral. C'est accrocheur et plutôt vendeur, non?

Cela faisait un bout de temps que cette idée me triturait l'esprit: mais les éternelles excuses revenaient toujours. " Et si ça ne me va pas ", notamment. Alors, lors d'un passage chez Régine au K salon, j'ai franchi le pas. Nous étions parties sur la même coupe que d'habitude. Très court sur les côtés, 3 millimètres, et un léger racourcissement pour l'épaisseur du dessus. Et là, une remarque: " un jour, tu vas finir la boule à z ". Du tac au tac, c'était lancé, après une dernière hésitation. Régine au taquet, ça faisait longtemps qu'elle n'avait pas rasé total! La tondeuse remonte de bas en haut jusqu'au sommet du front; les cheveux tombent, éparses, pour découvrir un crâne net. Je souris. Un peu intimidée de découvrir un autre aspect de moi-même, de ce changement radical et surprenant, un peu émue d'avoir franchi le cap mais sans rien laisser paraître. Je caresse ma nouvelle tête, émerveillée.

L'humeur de Marie #11L'humeur de Marie #11

Ma première sortie fut étrange: cette sensation d'être un inconnu, déambulant dans un corps nouveau. Ma tête et la tenue déconcertent, les passants sont interloqués: une chemise maintenue par des bretelles et un jean retroussé sur une paire de Dr Martens. C'est pourtant bien une femme qui marche dans cette rue. Je demande un renseignement à une dame d'une quarantaine d'années: non seulement elle me répond, mais elle me félicite et me complimente. " Il fallait oser, et cela vous va très bien! J'hésite à le faire ". Plus tard, ce sera une femme encore, travaillant pour la SNCF, sur le quai de la gare de Caen: ma longue veste en cuir noire, une chemise bleu marine et une paire de santiags aux pieds, je marche tranquillement. " Si je peux me permettre, ce style vous va super bien, et avec cette coupe de cheveux c'est génial! ". Ce renouveau a plu: les gens ont réagi de manière surprise, étonnée, admirative parfois. Je ne m'habituais pas tout de suite néanmoins à ce nouveau visage: me voir dans une glace me surprenait toujours autant, et les gestes quotidiens avaient changé. Ne plus se coiffer, se sécher les cheveux, transporter sa cire... On m'a parlé du miroir: mon moi et mes envies s'affrontent en permanence. Une envie de changer, d'essayer de nouvelles tenues, d'arborer un nouveau style, voire de se maquiller. Mais mon caractère profond s'y refuse. C'est une lutte sans merci: le crâne rasé réhausse cette féminité tant refoulée et dissimulée, mais qui s'empêche de ressurgir. Alors je m'arrête, je m'assois face au miroir, les bras entourant mes jambes, et j'observe patiemment et en silence. Que vois-je ? Une déception pour ma mère, blessée et se sentant trahie au plus profond d'elle-même; un dégoût et une laideur. C'est ainsi. Moi, je ne vois que mon reflet. Je suis la même, mais différente: je contemple ce corps recroquevillé aux grands yeux gris, et je me redécouvre.

Texte: Marie C.

Photos: Kriss Photography

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L'humeur de Marie #10

24 Juillet 2017 , Rédigé par jeaneg Publié dans #Chronique de Marie

L'humeur de Marie #10

Marine est née le 24 février 1974, est mariée depuis 20 ans, a aujourd'hui 43 ans, 4 enfants, un lapin stupide et préfère le café au thé. Et elle est allergique aux avocats aussi. Mais je crois que tout ça n'a strictement aucune importance. La fille aînée de Marine a les cheveux très courts, avec un skinfade forcément très marqué : elle est blonde, plutôt androgyne et un style de "garçon manqué" de la première heure. Marine et la coupe de son ainée, c'est comme Karl Marx et les capitalistes : une longue histoire d'amour.

Elle désapprouve donc plutôt fortement. C'est un peu trop court. Si ils étaient plus longs et avec une légère touche ( enfin plutôt une grosse couche ) de féminité, ce serait parfait. Et puis, elle n'est pas obligée d'avoir les cheveux courts après tout : on peut aimer les femmes sans forcément se raser. Ce qui est amusant, c'est que Marine a les cheveux courts elle aussi. Moins courts que sa fille, certes, mais tout de même. Ses cheveux bruns foncés reposent en une mèche souple devant son front, renforcés par du volume appuyés par une courte longueur pour ce qui est des côtés. Marine a eu les cheveux longs pendant longtemps : un carré aux épaules jusqu'à 18 ans. Une envie de changement, ne plus ressembler à la petite fille classique de bonne famille.

Jusqu'à son mariage, elle les laissa repousser : quand elle attendit sa première fille, elle les coupa à nouveau ( je pense que si on creusait un peu le sujet, on pourrait certainement trouver une espèce d'influence capillaire, ce qui expliquerait la passion de son aînée pour les cheveux courts ). 15 ans plus tard, retour chez le coiffeur pour l'actuelle coupe de cheveux. Une volonté de se moderniser, de ne pas faire '' vieille maman '' et de rester dans le vent. Elle arrange le tout avec un style qui reste classique, mais agencé avec modernité, sans suivre la mode pour autant. Marine à la fois sévère et fringuante , décontractée et élégante, désespérée par sa fille révoltée, et énervée lorsqu'elle est rasée : fort heureusement, Maman finit tout doucement par passer au dessus de tout ça. Mais la boule à zéro, c'est pas encore pour bientôt.

L'humeur de Marie #10

Texte et photos: Marie C.

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L'humeur de Marie #9

13 Juillet 2017 , Rédigé par jeaneg Publié dans #Chronique de Marie

L'humeur de Marie #9

C'est amusant de voir à quel point les gens peuvent changer leur regard pour de petites choses. Depuis qu'elle s'est coupée les cheveux, ils la regarde différemment. Comme si une tare profonde l'habitait. Elle l'a fait. Elle les a coupés. Et rasés en plus. '' Seigneur, quelle infamie ! '' C'est forcément lié à un problème de personnalité. Il doit y avoir un trouble quelque part, une araignée au plafond, un mal être profond. Mais qu'est-ce qui lui a pris ? Elle était tellement jolie... Quel gâchis... Elle était '' normale ''. C'est justement pour bannir cette '' normalité '', qu'elle est passée à l'acte. Ne plus être comme tout le monde. Ne plus suivre le troupeau. Ne plus être formatée sur un modèle universel. Adieu les cheveux longs, le carré classique avec le balayage banal, mais aussi les jupes et les talons. Maintenant, ce sera jean et Doc Martens. Cela ne fait pas d'elle un garçon. Elle est elle, et ce, profondément ; en adéquation et en osmose avec son identité profonde. Se couper les cheveux, ce choix, c'est se laisser évoluer dans un sens qui lui convient. Cette sensation agréable est seulement perturbée par le regard de malencontreux badauds. Mais cela devient un jeu : elle s'amusera à les faire douter et sèmera l'incertitude. Un enfant s'approche, lève la tête, fixe son regard dans ses yeux verts : cette interrogation innocente lui fait esquisser un sourire. Il ou elle ? Bonjour Monsieur, bonsoir Madame ? Non. Juste elle.

Texte et photo: Marie C.

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L'humeur de Marie #8

2 Juillet 2017 , Rédigé par jeaneg Publié dans #Chronique de Marie

'' Il est beau ton frère ''. C'est ce qu'a dit une camarade de classe à ma petite sœur, qui avait 8 ans, à l'époque. Pourtant, ma sœur n'a pas de frère, mais une grande sœur. Elle a les cheveux très courts, rasés de près, s'habille comme un garçon : des jeans serrés, une paire de Dock, des chemises à carreaux avec des blousons en cuir. C'est qu'elle ne ressemble pas trop à une fille. C'est un peu plus compliqué que ça. Comment lui expliquer que le corps n'est qu'une construction, qu'il y a un fossé entre le sexe et le genre ? Que ce dernier est indépendant des attributs qui nous sont donnés à la naissance ? Qu'on peut naître femme mais ne pas toujours se percevoir comme tel ? C'est compliqué de comprendre tout cela si jeune. Alors elle pose des questions, mais sans comprendre. D'ailleurs, elle croit toujours que '' mon amoureux '' est mon meilleur ami, même s'il préfère George Michael à Pénélope Cruz. '' Je veux voir comment ta coiffeuse elle te coupe les cheveux ''. Pour la première fois, elle viendra chez un barber. Elle verra le savoir-faire, l'art de raser des cheveux avec passion, dotée d'une précision et d'une minutie sans égal. Peut-être sera t-elle à la fois un peu effrayée, et émerveillée, à la vue de la tondeuse. Un sentiment assez paradoxal, en somme. Elle est curieuse de savoir pourquoi sa frangine y va aussi souvent, avec de moins en moins de cheveux à chaque fois qu'elle en ressort : certes, elle trouve ça laid, et me traite de '' paillasson '' ou de '' hérisson '' selon ses humeurs. Mais cet intérêt soudain, qui est aussi un prétexte pour passer du temps avec moi, me laisse penser que c'est une bonne chose. Avec de la chance, elle coupera ses longs cheveux châtains et trouvera cette assurance caractéristique des femmes aux cheveux courts. Alors, un mot, un seul : '' ose ''.

Texte et photo: Marie C.

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L'humeur de Marie #7

25 Mai 2017 , Rédigé par jeaneg Publié dans #Chronique de Marie

L'humeur de Marie #7

'' Je vous parle d'un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître ''. Si vous vous trouvez dans le passage Molière, qui est une petite voie s'échappant de la rue Saint Martin, et que vous voyez ces quelques phrases célèbres peintes sur la vitrine d'un bâtiment, vous vous trouvez sûrement devant la Maison de la poésie. La scène est petite, tout comme la salle, et cela donne une sensation de promiscuité. Tout est ressenti de manière décuplée : le son, les images, les mouvements. L'obscurité clairsemée de lumières rouges et violettes vous plonge dans un univers musical unique et hors du commun.

5 mots : Yes Is A Pleasant Country. 3 musiciens de talents, amis de longue date, livrant un concert slalomant entre jazz de chambre et free jazz. De longs poèmes lyriques sont mis en chanson, pour ensuite laisser place à des improvisations musicales. Ce soir là, deux compositions de la fameuse chanteuse sont jouées : Be sensational et Night shame pride. Bruno Ruder, ses mains parcourant le clavier de l'imposant piano à queue de manière rapide et subtile, jouant de paire avec le non moins célèbre Vincent Lê Quang, dont on entend le moindre souffle s'échapper de son saxophone.

L'humeur de Marie #7

Dissonants pour mieux se compléter, ces deux instruments s'unissent à la voix de Jeanne Added, qui monte dans les strates les plus aigües ( Reincarnation of a lovebird ) pour tour à tour s'enflammer, puis pour se faire tendre et mélodieuse ( I could write a book ). Vêtue de noir, un pantalon ample et une veste droite, ses cheveux courts coiffés en avant pour finir sur le côté, puis tombant sur son front, elle danse et avance, ne faisant qu'un avec son micro qu'elle tient entre ses deux mains. Un trio, un groupe, un ensemble inséparable. Des artistes passionnés, concentrés, donnant une prestation hors du commun : à la fois totalement présents sur scène, et disparaissant ailleurs. Rien n'est surjoué, rien n'est surfait : tout est vécu et sincère.

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L'humeur de Marie #6

27 Avril 2017 , Rédigé par jeaneg Publié dans #Chronique de Marie

Photo: Txema Yeste

Photo: Txema Yeste

Je la connaissais depuis de nombreuses années, mais Alice était unique en son genre.
C'était une sorte d'équation insoluble, composée de multiples termes, sans jamais aboutir à un seul résultat : Elle. Alice était tout, sauf elle-même. La seule chose qui était constante dans cette étrange composition, c'était ses cheveux, portés souvent très courts. Une nuque impeccable pour une peau claire, visible aux yeux de tous, et de petites oreilles dégagées, toujours à l'affut. 

C'était une ronde de personnages, des rôles dans des situations données, des nombres évoluant dans un espace. Des cartes tirées du paquet et abattues au moment voulu.
Un genre de signe, une ligne sans fin ; une couleur, le noir, puisqu'il n'en était pas une. Elle n'était pas, tout simplement, et n'existait qu'à travers ses personnages. 

Tour à tour, Alice était Armande : un crâne fraîchement rasé pour un skin fade, suivi d'un imper en cuir noir pour un côté sévère. On la dévisage, avec son côté aryen, ses cheveux blonds et ses grands yeux bleus. Il n'en était rien, et elle voguait très loin de ces idées.  Un jour arrivait Liz, avec un blazer long, une touche de maquillage pour rehausser une féminité dissimulée, avec une coupe au bol pour un air plus délicat. Si elle ne voulait pas être une grande fille, elle serait un petit garçon : c'était Clémentine, un jean un peu large, les cheveux ébouriffés plus ou moins coiffés, et une paire de converses pour un t-shirt à col rond. 

Pessimiste et optimiste, solitaire et entourée, patiente et exaspérée, engagée et je m'en foutiste, indécise et déterminée. Tout et son contraire. Une équation caméléon.
Tel était son malheur et sa chance : ne pas savoir ce qu'était qu'être soi.  En contrepartie, elle pouvait se permettre d'être autre, de jouir d'une liberté illimitée en s'autorisant à être une foultitude de personnes. Femme un jour, homme un autre, les deux ou aucun. La seule chose qu'Alice mettait un point d'honneur à conserver, c'était ses cheveux. Jamais longs, toujours courts. 

Texte: Marie C.

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