La grande aventure
Loin de moi l'idée de ramener les grands projets à des détails terre-à-terre et encore moins de vouloir briser les élans d'enthousiasme des aventurières conquérantes... Mais!
Si comme je l'imagine, celles qui s'apprêtent à parcourir le monde sont des femmes aux cheveux courts, voir très courts, habituées à livrer leur chevelure chaque mois aux lames d'un coiffeur expert, il faut bien envisager que l'aventure va durer plusieurs mois et que faute de laisser pousser ses cheveux ou de les réduire à leur plus simple expression à coup de tondeuse, il va bien falloir à un moment affronter "le coiffeur local". Et croyez moi, ce n'est pas toujours simple...
Parce qu'évidemment vous n'aurez pas tracé votre itinéraire en fonction du réseau Jacques Dessange à travers le monde, mais plutôt pour découvrir des coins typiques, authentiques et... un peu à l'écart de la civilisation.
Deux options. Vous partez avec une bonne paire de ciseaux et un bonnet, que vous ne quitterez plus de l'Australie à l'Alaska, ou bien vous avez suffisamment de cran pour explorer aussi le coiffeur du coin.
Je dis le coiffeur, parce que comme je l'imagine, certaines contrées que vous visiterez n'offre pas aux femmes ce genre de soins.
Et là... comment dire... C'est un peu comme l'épreuve d'immunité de Kho Lanta. Il faut prendre une grande respiration et y aller avec le sourire.
Mais une fois l'étape franchie, c'est certain, vous aurez tous les gros durs du coin dans votre poche.
Bon, évidemment mon argumentaire ne tient pas la route très longtemps, on est jamais très loin d'un endroit civilisé pour se faire dorloter un peu après avoir traversé la Cordillière des Andes à dos de lama, mais bon. La civilisation c'est aussi une notion toute relative dans certains coins du globe.
En tout cas, la prochaine qui part à l'aventure, je suis preneur de son récit de voyage à la découverte... des coiffeurs du monde entier.
Photos: Dominic Chiam (h) et Rafael Sacasa (b)
Pour toujours
C'est le portrait d'une femme, comme un symbole. Une femme des années 50 qui pourrait ressembler à ma propre mère, mais aussi une femme hors du temps par la magie du cinéma. Si bien que j'ai pu en être épris lorsqu'elle était Ilsa Lund dans le coeur d'Humphrey Bogart ou Maria dans les bras de Gary Cooper. C'est la reine du cinéma.
Sa blondeur scandinave et ses cheveux courts ont sans doute orientés mon désir, mais de cette époque, toutes les femmes avaient les cheveux courts, à Hollywood comme ailleurs, alors c'était sans doute ces personnages. Des femmes dans l'adversité, tiraillées entre devoir et sentiments, bouleversées par la vie et sauvées par l'amour.
Et cette année, c'est ce portrait d'Ingrid Bergman qui illumine la Croisette. Le portrait merveilleux d'une femme aux cheveux courts à travers laquelle chacun a des souvenirs, des références, des émotions, de l'admiration ou du désir et je trouve que cela donne de la noblesse à cette grande foire du cinéma qui a perdu pas mal de son glamour d'antan
Photo: David Seymour
Combien de fois?
C'est un peu par hasard, c'est vrai.
N'empêche que la première fois qu'elle a coupé ses cheveux,
qu'elle a empoigné sa chevelure devenue courte, qu'elle a secoué sa tête
sans être décoiffée, un grand sentiment de liberté l'a envahie. C'est à ça qu'elle a pensé.
Et puis quelques matins plus tard, elle s'est amusé à couper un peu la pointe de ses mèches floues. Elle a mordu le bord de sa lèvre en regardant son image dans la glace,
elle a glissé ses cheveux derrière les oreilles, dégageant son visage...
Oui, pourquoi pas. C'était une envie, comme une tentation. Oser, ne pas oser...
Le plus dur était fait, après tout. Difficile de dire combien de fois elle a pensé à les couper, encore plus court. Et puis un jour, c'était trop évident. Cela allait de soi. Plus de cheveux dans le visage, les oreilles dégagées, la nuque aussi... C'est à ça qu'elle pensait depuis le début finalement, c'est bien ça qu'elle voulait, les étapes précédentes, le milong, le propret, c'était juste pour rassurer les autres ou se rassurer elle-même...
Depuis trop longtemps elle y pensait et aujourd'hui elle s'est dit qu'il était temps d'être enfin soi même.
Photo: Heather Kemesky pour Everlane
Les Dames de la Côte
J'ai une vie formidable!
Et de temps en temps c'est bien de se le dire.
J'ai donc un mot d'excuse pour le vide d'article de ces deux derrniers jours: " Veuilez excuser l'absence du petit Jeaneg qui était sur la Côte d'Azur pour voir des amies." Je ne sais pas si ça va passer, mais comme c'est la vérité j'ai la conscience tranquille.
Après une soirée avec Delf, ma petite soeur de coeur, celle qui sait mieux que les autres ce qu'est ma dilection pour les cheveux courts, j'ai filé le lendemain à la rencontre de Patricia et Séléna. Personne n'a oublié ce "Quartier Libre" de mère en fille parut ici au mois de janvier.
C'est toujours mieux quand on peut se parler en tête à tête, découvrir les personnes de chair et d'os et papoter des heures en sirotant un Mojito. Quel agréable moment...
Patricia m'avait déjà presque tout révélé, pourtant il y avait encore tant de choses à dire... Séléna "en vrai", parfaitement nature, en pleine addiction, les cheveux toujours plus courts, qu'elle tentait parfois d'ébouriffer, sans succès tellement ils sont tondus à présent... Toutes deux sont bien les femmes que la virtualité m'avait laissé deviner, authentiques et déterminées, aux âmes aussi fusionnelles que deux jumelles, se reflettant l'une l'autre sur l'échelle du temps.
J'aurais voulu rester plus longtemps, peut être m'enivrer de vin rosé et refaire le monde. Mais tant pis, ma vie est tout de même formidable!
Paradoxale sensualité
Même si depuis longtemps j'étais apaisé quant à ma psychosexualité, il m'arrivait encore d'accaparer le temps et le savoir de ma psy, tant ce domaine me semblait vaste et sans limites.
Ainsi, la tendance chez certaines jeunes femmes, qui n'avait échappé ni à Laora ni à mon oeil d'expert, de fréquenter des salons où l'on savait leur tailler les cheveux d'une manière jusque là appartenant au style masculin, ce skin fade qui effaçait littéralement la ligne d'implantation des cheveux en un dégradé au fondu parfait, provoquait chez moi une admiration étrange...
Moi "- Avoue que c'est tout de même paradoxal, la sensualité que peut évoquer ce geste qui consiste à rebrousser une nuque tondue ras, lorsqu'il est fait par une femme...
Ma Psy - Où est le paradoxe che te brie?
Moi - Eh bien... Cela pourrait sembler une coupe sévère, absolument à contre pied de ce que l'on considère comme féminin, brutale et dont on ne s'attend pas à ce qu'elle puisse inspirer une quelconque concupiscence.
Ma Psy - Et tu benzes qu'une femme qui ferrait le même cheste fait par un homme ne serait pas " jarmée"?
Moi - Jarmée?
Ma Psy - Ja... Zéduite, douchée, émue, adentrie...
Moi - Ah ben oui... Jarmée donc... Bon enfin, oui je pense que tu as raison. Mais pour ma part voir un homme faire ce geste ne me fait rien, alors que voir une femme le faire me fait fondre.
Ma Psy - Ou pien ezque c'est barzque zette femme a la nuque razée comme un karzon?
Moi - Oh non pitié Doc, j'ai dépassé ce stade. Une femme est une femme et j'aime les femmes qui cassent les codes.
Ma Psy - Ach! Che te taguine... zette zenzualidé, z'est la nuque qui la profoque. Z'est la nuque qui est zenzuelle, pas la fazon dont elle est razée... ou pas.
Moi - ... Ah?... Tu crois?
Photo: Florianne Satre
Raide!
Evidemment, tout le monde se plaint tout le temps et donc celles qui ont les cheveux bouclés les aimeraient raides comme la Justice et celles qui ont des baguettes de tambour rêvent de bouclettes un peu folles... C'est bien connu, y a rien de nouveau là dedans...
Moi qui aime la nature sans artifice, j'avoue une certaine tendresse pour celles qui s'acceptent telles qu'elles sont et savent en tirer le meilleur. Question de style.
Et en matière de style, il y a bien des avantages à avoir le cheveux raide. A condition d'aimer la netteté et le tranchant d'une coupe graphique. Of course.
Epaisse comme un rideau de velours ou éffilée comme un voile de tulle, la frange ne souffre aucune médiocrité bien sûr. Pas plus que la rectitude du carré, droit et affuté comme une lame.
Parce que finalement, avoir du style, c'est un peu s'imposer certaines obligations qui aux yeux des autres peuvent paraître futiles, considérer que quelques millimètres de plus ( ou de moins ) change tout, mais tout, dans l'allure que vous donne une simple frange, que votre coupe au carré, aussi basique soit-elle, reste remarquable parce qu'elle est constament aussi nette que si vous sortiez à l'instant de chez le coiffeur...
Bref! L'effort est presque aussi grand que si vous aviez les cheveux très courts...
Question de style!
Intimité... complicité
Il n'y a pas si longtemps, le coiffeur c'était comme l'école publique. Les filles d'un côté et les gars de l'autre. Chacun ses habitudes. Et même lorsqu'on a fait valoir une certaine mixité, il y avait toujours un coin pour les unes et un autres pour les hommes dans le même salon...
De cette époque peut être, reste-t-il une certaine pudeur, un besoin d'intimité, lorsqu'en tête à tête, on part à la recherche de soi même ou que l'on a besoin d'un radical changement pour clore un chapitre.
Après une période qui n'est sans doute pas terminée, où la vraie mixité fut de rigueur, mais en tentant d'entrainer les hommes dans un univers un peu féminisé, avec bac à shampooing, petit café et brushing, on assiste à une renaissance des bons vieux salons de barbier.
Un juste retour des choses, amélioré par cette habitude de ne plus réserver les salons de coiffure à un genre en particulier. Cette fois ce qui détermine le choix de l'un ou de l'autre, c'est le style. Et lorsqu'on est une femme aux cheveux courts " comme les garçons ", tout naturellement on s'adresse aux professionnels spécialisés. Non?
Du coup cela permet une certaine complicité, entre celles et ceux qui aiment les cheveux courts, très courts, familiers des tondeuses électriques et du fondu dans le dégradé...
Photo: Elliot S et Adam SC chez Decatur & Sons
Ce n'est pas grand chose
Ce n'est pas grand chose, c'est même presque rien... Un instant, il prend le recul suffisant pour réaliser à quel point il l'aime, il se dit que c'est depuis toujours, il se jure que c'est pour toujours.
Sa jeunesse le fascine et il ne parvient pas à trouver un défaut à sa beauté, mais il n'imaginait pas qu'il serait tant troublé. Elle avait coupé ses cheveux et soudain c'était comme s'il la découvrait vraiment. Elle, cet être qui lui était familier, cette personne intime plus que tout autre, il avait le sentiment étrange qu'elle lui était cachée auparavant.
Il était envoûté par le dessin de cette oreille nue, attendri par cette pointe de cheveux ras qui s'esquissait sur sa joue, sous le charme de ce cou élancé qu'il n'avait jamais imaginé si puissant et délicat en même temps. Et le trouble, à cet instant, faisait naître une émotion surprenante, il le sentait bien au rythme de son coeur.
La réalité était que ce charme nouveau n'était que l'expression d'une âme, d'un intérieur et lui avait ce sentiment orgueilleux d'être enfin initié, d'avoir accès à cette vérité, de découvrir, enfin, cette part d'elle, ambigue, qui la rendait encore plus jeune, encore plus belle.
Photo: Eugene Kukulka
Icône
Vous pouvez chercher dans votre mémoire... Elles ne sont pas très nombreuses ces étoiles filantes qui dès leur apparition ont subjugué la planète.
Je me demande aujourd'hui si quelqu'un ignore qui était Jean Seberg? Peut être que les plus ignorant(e)s imaginent simplement que c'est un style de coiffure, mais quand bien même, c'est déjà ça.
Question de conjoncture direz vous? Pour être l'icône de la Nouvelle Vague il faut bien arriver au bon moment, ni avant, ni après. Certes! Pourtant cela ne suffit pas.
Si elle est plutôt jolie du haut de ses 17 ans, le rôle de sainte guerrière qu'on lui fait endosser et les cheveux ras qu'on lui impose sont certainement ce qui va faire la différence. Premiers pas dans le monde et la voilà propulsée au firmament parce que sa jeunesse et sa fraîcheur ne sont pas altérées par cette coupe de cheveux qu'on ne connait pas aux femmes à cette époque. Et cela restera...
Bonjour Tristesse... A bout de souffle. Nous y sommes. Jean Seberg devient d'un seul coup l'image de cette jeunesse éternelle, audacieuse, indépendante, son accent et son t-shirt du Herald Tribune lui donne de l'exotisme et ses cheveux courts la rendent inclassable, merveilleusement féminine en robe, terriblement "tomboy" en pantalon.
Les américains appellent sa coupe de cheveux "gamine" ou "pixie", nous on va dire "garçonne" parce qu'on ne sait pas dire mieux. Cependant, sans rien nier du talent de la jeune américaine, je me demande parfois si les choses auraient été si fortes si elle avait gardé les jolies boucles blondes de son adolescence...
Photos de haut en bas: Bonjour Tristesse (1958), Sainte Jeanne (1957), A bout de Souffle (1960)
Electroménager
Sans doute personne n'aurait imaginé chez Wahl, même dans les rêves les plus hallucinés de son directeur marketing, qu'un jour les produits de la marque auraient autant de notoriété que l'aspirateur de Hoover ou le réfrigérateur de Frigidaire.
L'invention d'un moteur électromagnétique vibrant était génial, il y a 100 ans. Cela réduisait considérablement le volume d'un appareil destiné par exemple à l'entretien des animaux. Du coup les coiffeurs pouvaient eux aussi s'équiper de ces toutes nouvelles tondeuses électriques et ratiboiser à tour de bras les kids de l'Oncle Sam.
Mais surtout, cette facilité d'usage allait permettre à tout un chacun de s'improviser coiffeur à la maison et dès les années 50 la marque faisait la promotion de cet usage domestique, alors bien sûr réservé uniquement au bien être du sexe masculin dont madame s'occupait... Hum!
Bien sûr il fallut un peu plus de temps pour voir chez nous cet appareil exclusivement professionnel muter vers l'électroménager courant. On peu même dire que c'est assez récent.
Récent, mais fulgurant! Je suis prêt à parier mon quart de solde qu'aujourd'hui tout le monde a une tondeuse électrique chez lui. Et si, comme d'habitude, au départ il s'agissait de rafraichir la coupe de monsieur ou celle du petit dernier, ce sont dorénavant les femmes qui en sont les utilisatrices à part égale ( ou presque ). Surtout les plus jeunes ( mais pas que... ) qui sont capables ainsi de survivre au manque de moyens pour se payer le coiffeur régulièrement comme l'exigerait leur coupe de cheveux.
Merci Leo quoi!